En ce 17 mai 1941 la simple vue du décor de nos arènes bayonnaises faisait froid dans le dos, mais revenons un peu en arrière…
Durant l’occupation
Durant l’occupation, le commandement local, sollicité avec une certaine insistance par ses sbires qui souhaitaient découvrir ce qu’était une corrida, refusait systématiquement, par crainte des attentats, de les autoriser à y participer.
Puis devant l’insistance de certains hauts gradés, émanant même de certains basés à Bordeaux, il fut décidé d’organiser une corrida « spéciale SS », oui vous avez bien lu !
Il parait même que les plus hautes autorités du Reich en ont été informées et ont donné leur aval, le sinistre Goebbels* y ayant sans doute décelé un potentiel vecteur de diffusion de sa propagande.
La corrida se prépare
Dès lors les préparatifs s’accélèrent, organisation de la mise en scène, sélection des toreros (P. Gonzalez, Torerito, Gitanillo de Triana et Belmonte (à cheval)), réquisition du photographe, déploiement d’immenses croix gammées, bref le décor est planté.
Manque plus que le « public », celui-ci provient de toutes les garnisons d’Aquitaine. Les arènes sont pleines « d’Aficionazis », avec pour la première fois un public au garde à vous !
Cela s’est passé le 17 mai 1941, il faut croire que cet « événement » n’obtiendra pas le succès escompté puisqu’il n’y aura (heureusement) plus d’édition de ce genre.
Les arènes comme vous ne les avez jamais vues !
Une idée reçue qui perdure…
*Joseph Goebbels ministre de la propagande et expert en manipulation des masses, est notamment à l’origine de l’infâme mystification visant à discréditer la France en faisant croire aux allemands que les français, dont aucun n’a résisté à leurs troupes (sic)… préféraient s’adonner à la délation permanente…
Le pire dans tout ça, c’est que les français sont tombés eux même dans ce piège en croyant cette ignominie. Même si cela a existé, cela n’a jamais été aussi répandu qu’on pourrait le croire encore aujourd’hui, en tout cas pas plus que dans les autres pays sous occupation.
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Si de
nos jours, nos voisins Allemands ont la réputation de voyager beaucoup, surtout
lorsqu’ils sont à la retraite, chose que l’on peut comprendre car il faut bien
qu’ils s’occupent (quand ils n’occupent pas leurs voisins…), il fut un temps ou
leur présence n’avait rien de touristique.
Déjà
que la vie n’était pas facile à l’époque, les années qui ont vu la seconde
guerre mondiale ont été encore plus dures à vivre à Bayonne (comme dans la
plupart des autres villes et campagnes).
Arrestations, déportations, contrôles quasi permanents, perte de proches étaient le lot quotidien de ces courageux hommes et femmes, qui ont fait face malgré tout.
Les
contraintes imposées aux commerçants des Halles comme par exemple l’obligation
de tirer les charrettes en bois, en effet, le simple fait de « pousser » sa
charrette était alors considéré comme un acte potentiellement terroriste.
Ces années ont été terribles ici aussi, couvre-feu, patrouilles permanentes, le claquement des bottes résonnant dans les rues du Petit-Bayonne et autour des Halles, la peur s’est installée…
Cette époque a fortement marqué les Bayonnais.
Malgré
tout une forme de détermination commence à imprégner les esprits, la résistance
s’organise, prenant des formes multiples, et officiant à tous les niveaux.
Comme
par exemple la trappe amovible au sol dans le couloir de l’appartement ou je
suis né rue Bourgneuf, et qui servait de cache d’armes, les doubles rideaux
opaques des appartements Bayonnais masquant tant bien que mal l’éclairage
intérieur aux patrouilles omniprésentes, et bien entendu les multiples « TSF »
permettant de s’informer de la (vraie) situation via « Radio Londres »
Ceci
n’a pourtant pas empêché de nombreux Bayonnais d’être arrêtés, parfois pour des
raisons futiles, comme mon grand-père qui fut déporté avec d’autres locaux au
Stalag XII F de Forbach, laissant ma grand-mère seule avec ses trois enfants.
Concernant
ce Stalag, j’ai voulu en savoir un peu plus, et voici ce que j’ai découvert…
Stalag
XII F de Forbach
Au 1er
septembre 1943, étaient dénombrés dans ce camp 17 524 Français, 312 Belges, 2
623 Polonais, 4 923 Slaves (Serbes etc..) et 23 623 Soviétiques, soit un total
de 49 015 prisonniers.
Les
plus faibles étaient condamnés à mourir.
Tous
les jours une trentaine de cadavres étaient transportés dans des charrettes
tirées par quatre prisonniers qui les jetaient dans des fosses communes.
Aux conditions inhumaines de détention s’ajoutait le typhus du au manque total d’hygiène.
Ce n’est qu’après l’épidémie du typhus surmontée, que des transports de prisonniers soviétiques dans le Stalag XII F sont arrivés en été 1942 et ce contingent a constamment augmenté jusqu’en août 1944.
Le nombre des victimes qui sont décédées au printemps 1942 pendant les transports sur rail, de fièvre et de malnutrition ne peut être estimé, car seulement les survivants ont été enregistrés en tant que prisonniers du Stalag XII F.
Au 1er
août 1944, dans l’ensemble du XII-F (Forbach) on dénombre un total de 29346
prisonniers de guerre soviétiques et 2804 prisonniers de guerre polonais. Pour
ce qui concerne les autres nationalités, le nombre total est inconnu.
Jointe à ce post, vous trouverez une photo envoyée innocemment à mon grand-père, bien entendu cette photo ne lui est jamais parvenue car jamais partie. Elle avait été récupérée par le facteur à cause des risques encourus selon lui.
Les enfants ne l’ont su que beaucoup plus tard…
A la
fin de la guerre lorsqu’il en est revenu, il était méconnaissable, il pesait…
42kgs pour 1m78 !
D’autres
en revanche n’ont pas eu « sa chance » …
Inutile
de préciser que ces années furent extrêmement difficiles pour les commerçants
des Halles, qui en plus d’un travail des plus pénibles, ont subi ces
souffrances et contraintes dans un climat de risque permanent.
En 1944, alors qu’une lueur d’espoir renaît, une nouvelle tragédie frappe non pas Bayonne, mais Biarritz, en effet en ce lundi ensoleillé du 27 mars, la ville voisine subit le bombardement massif de 3 escadrilles de bombardiers américains.
Le
bilan est lourd, très lourd, Les bombes font 117 morts et 250 blessés. 375
maisons et immeubles sont détruits.
Sur le carreau des Halles, c’est la stupeur ! Certains commencent à s’organiser pour aller porter secours, oubliant par la même et logiquement, tout esprit de rivalité.
Comme si ce n’était pas suffisant, les tragédies s’enchainent, après le bombardement de Biarritz, c’est le toit des Halles de Bayonne qui s’effondre… en ce rude hiver 1944/1945.
Mais ça c’est une autre histoire, celle de notre cher pays.
Je voudrais rendre hommage à celles et ceux qui nous ont donnés tant de leçons de courage en une époque si trouble, peut-être cela nous aidera-t-il à nous plaindre un peu moins de notre condition d’aujourd’hui…
Je conclurais avec une pensée pour Alexis de Tocqueville qui écrivait, « Quand le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres »
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