A l’époque du lundi au samedi, les trois quais entourant les Halles (Galuperie, Dubourdieu et Jaureguiberry) s’animaient dès minuit, les camions gorgés principalement de fruits et légumes se faufilaient sur les quais étroits.
Une
fois garés devant les établissements de gros, ils étaient pris d’assaut par des
cohortes de « ripeurs » qui s’employaient à les décharger (à la main), pour
vous donner une petite idée, un camion de 19T contenait environ 6000 plateaux
de pèches…
Selon
les jours, les bars ouvraient à leur tour leurs portes entre 3h30 et 4h, «
Jeannot » au Clou (Je ne me souviens pas du prénom de son prédécesseur, si
quelqu’un s’en rappelle…) et Agna qui avait la particularité de soigner le zona
de ses mains, et que l’on venait consulter de loin.
Elle sera remplacée plus tard par Francis Saint Laurent un enfant du quartier et son épouse.
Francis
affable et haut en couleur, dont le seul défaut que lui trouvaient ses clients
était qu’ils ne pouvaient jamais en placer une. Francis était très fier de son
acquisition qui constituait pour lui un aboutissement.
Fin pêcheur, il passait son temps entre son comptoir et le quai juste devant le bar, ou il disposait dès l’ouverture deux cannes à pêche dans l’espoir de prendre la louvine du siècle !
Aujourd’hui,
on peut constater que le temps a fait son œuvre et la physionomie du quai a
bien changé.
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Courant
des années 70 tout à côté de l’ancien « Bazar Central », et à l’emplacement
actuel du restaurant « Les Tontons flingueurs », se trouvait l’établissement «
Aux 4 saisons » qui n’avait rien à voir avec Vivaldi, mais qui était plutôt
orienté fruits et légumes en gros, demi-gros et détail.
Jean-Claude
Lacondéguy et Jacques Quintal en étaient les propriétaires, et avaient eu
l’idée de créer un commerce de détail tout en fournissant les autres
détaillants des Halles, restaurateurs locaux etc…
Si de
nos jours, nos voisins Allemands ont la réputation de voyager beaucoup, surtout
lorsqu’ils sont à la retraite, chose que l’on peut comprendre car il faut bien
qu’ils s’occupent (quand ils n’occupent pas leurs voisins…), il fut un temps ou
leur présence n’avait rien de touristique.
Déjà
que la vie n’était pas facile à l’époque, les années qui ont vu la seconde
guerre mondiale ont été encore plus dures à vivre à Bayonne (comme dans la
plupart des autres villes et campagnes).
Arrestations, déportations, contrôles quasi permanents, perte de proches étaient le lot quotidien de ces courageux hommes et femmes, qui ont fait face malgré tout.
Les
contraintes imposées aux commerçants des Halles comme par exemple l’obligation
de tirer les charrettes en bois, en effet, le simple fait de « pousser » sa
charrette était alors considéré comme un acte potentiellement terroriste.
Ces années ont été terribles ici aussi, couvre-feu, patrouilles permanentes, le claquement des bottes résonnant dans les rues du Petit-Bayonne et autour des Halles, la peur s’est installée…
Cette époque a fortement marqué les Bayonnais.
Malgré
tout une forme de détermination commence à imprégner les esprits, la résistance
s’organise, prenant des formes multiples, et officiant à tous les niveaux.
Comme
par exemple la trappe amovible au sol dans le couloir de l’appartement ou je
suis né rue Bourgneuf, et qui servait de cache d’armes, les doubles rideaux
opaques des appartements Bayonnais masquant tant bien que mal l’éclairage
intérieur aux patrouilles omniprésentes, et bien entendu les multiples « TSF »
permettant de s’informer de la (vraie) situation via « Radio Londres »
Ceci
n’a pourtant pas empêché de nombreux Bayonnais d’être arrêtés, parfois pour des
raisons futiles, comme mon grand-père qui fut déporté avec d’autres locaux au
Stalag XII F de Forbach, laissant ma grand-mère seule avec ses trois enfants.
Concernant
ce Stalag, j’ai voulu en savoir un peu plus, et voici ce que j’ai découvert…
Stalag
XII F de Forbach
Au 1er
septembre 1943, étaient dénombrés dans ce camp 17 524 Français, 312 Belges, 2
623 Polonais, 4 923 Slaves (Serbes etc..) et 23 623 Soviétiques, soit un total
de 49 015 prisonniers.
Les
plus faibles étaient condamnés à mourir.
Tous
les jours une trentaine de cadavres étaient transportés dans des charrettes
tirées par quatre prisonniers qui les jetaient dans des fosses communes.
Aux conditions inhumaines de détention s’ajoutait le typhus du au manque total d’hygiène.
Ce n’est qu’après l’épidémie du typhus surmontée, que des transports de prisonniers soviétiques dans le Stalag XII F sont arrivés en été 1942 et ce contingent a constamment augmenté jusqu’en août 1944.
Le nombre des victimes qui sont décédées au printemps 1942 pendant les transports sur rail, de fièvre et de malnutrition ne peut être estimé, car seulement les survivants ont été enregistrés en tant que prisonniers du Stalag XII F.
Au 1er
août 1944, dans l’ensemble du XII-F (Forbach) on dénombre un total de 29346
prisonniers de guerre soviétiques et 2804 prisonniers de guerre polonais. Pour
ce qui concerne les autres nationalités, le nombre total est inconnu.
Jointe à ce post, vous trouverez une photo envoyée innocemment à mon grand-père, bien entendu cette photo ne lui est jamais parvenue car jamais partie. Elle avait été récupérée par le facteur à cause des risques encourus selon lui.
Les enfants ne l’ont su que beaucoup plus tard…
A la
fin de la guerre lorsqu’il en est revenu, il était méconnaissable, il pesait…
42kgs pour 1m78 !
D’autres
en revanche n’ont pas eu « sa chance » …
Inutile
de préciser que ces années furent extrêmement difficiles pour les commerçants
des Halles, qui en plus d’un travail des plus pénibles, ont subi ces
souffrances et contraintes dans un climat de risque permanent.
En 1944, alors qu’une lueur d’espoir renaît, une nouvelle tragédie frappe non pas Bayonne, mais Biarritz, en effet en ce lundi ensoleillé du 27 mars, la ville voisine subit le bombardement massif de 3 escadrilles de bombardiers américains.
Le
bilan est lourd, très lourd, Les bombes font 117 morts et 250 blessés. 375
maisons et immeubles sont détruits.
Sur le carreau des Halles, c’est la stupeur ! Certains commencent à s’organiser pour aller porter secours, oubliant par la même et logiquement, tout esprit de rivalité.
Comme si ce n’était pas suffisant, les tragédies s’enchainent, après le bombardement de Biarritz, c’est le toit des Halles de Bayonne qui s’effondre… en ce rude hiver 1944/1945.
Mais ça c’est une autre histoire, celle de notre cher pays.
Je voudrais rendre hommage à celles et ceux qui nous ont donnés tant de leçons de courage en une époque si trouble, peut-être cela nous aidera-t-il à nous plaindre un peu moins de notre condition d’aujourd’hui…
Je conclurais avec une pensée pour Alexis de Tocqueville qui écrivait, « Quand le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres »
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Saviez-vous
que les Halles de Bayonne qui ont précédé celles d’aujourd’hui, disposaient
d’un poste de police ainsi que de toilettes publiques.
Ces
deux endroits étaient confiés à deux personnages incontournables qui, pour ceux
qui les ont connus, se définissaient comme les garants zélés d’un ordre et
d’une propreté ne souffrant aucune incartade…
Elle
s’appelait Yvonne Lacaze, elle a consacré sa vie à sa famille et… aux Halles de
Bayonne ou elle a commencé à travailler en 1922 à l’âge de 11 ans, elle y
vendait des fruits et des légumes, mais aussi des cèpes lorsque la saison
arrivait.
Jusqu’à
l’âge de 70 ans, elle s’est levée entre 2h30 et 3h30 du matin, selon
l’importance du marché du jour.