Saviez-vous que les Halles de Bayonne qui ont précédé celles d’aujourd’hui, disposaient d’un poste de police ainsi que de toilettes publiques.
Ces deux endroits étaient confiés à deux personnages incontournables qui, pour ceux qui les ont connus, se définissaient comme les garants zélés d’un ordre et d’une propreté ne souffrant aucune incartade…
Honneur aux dames, nous allons donc commencer par ces toilettes publiques, situées à (l’ancien) angle donnant sur le bar François et la jardinerie Forsans.
Le lieu se résumait à un couloir avec sur sa partie gauche 4 ou 5 portes d’accès aux toilettes, juste en face se trouvait une table derrière laquelle trônait la « tenancière » des lieux.
Dès l’arrivée et au premier regard, il était clairement convenu qu’elle ne tolèrerait aucun « dérapage », ce qui, soit dit en passant permettait de disposer de lieux d’aisance sans doute plus nets que certains que l’on rencontre de nos jours.
Mais ce n’est pas tout ! Mme Denise (si je me souviens bien) avait en quelque sorte doublé son dispositif, elle avait prévu un « Plan B », juste au cas où…
En effet, une fois que l’on avait investi les lieux, on découvrait une affichette apposée sur l’intérieur de la porte, il y était écrit ceci : « Ch… dur, ch… mou, mais ch… dans le trou ! »
Ah… poésie quand tu nous tiens !
Quoi qu’il en soit, l’ensemble du dispositif était conçu de telle sorte à éviter tout quiproquo, ce que tout le monde avait d’ailleurs bien compris dès l’arrivée !
Le minuscule poste de police quant à lui, était confié à la haute bienveillance de notre Brigadier favori (rouler les R) portant le doux patronyme de « Poublanc ».
Assez grand et corpulent, parfois conciliant, souvent autoritaire, il prenait très au sérieux la lourde tâche dont on l’avait investi, à savoir faire régner l’ordre et la discipline dans et autour de ces Halles, qui tenaient plus d’une fourmilière que d’un couvent de bénédictines.
Il lui arrivait de se mettre en colère, tout particulièrement lorsqu’un automobiliste ne marquait pas le stop juste devant ses yeux (ce qui arrivait environ toutes les deux minutes, tenant compte qu’avec la foule on ne voyait même pas le panneau)
Là un coup de sifflet strident couvrait le kilomètre carré alentour, et réveillant sans doute au passage la moitié de la population bayonnaise.
Le « chauffard » immédiatement interpellé, notre brigadier s’approchait lentement de la portière, sans doute pour ajouter un soupçon de dramaturgie à la situation, puis prenait une posture altière à la hauteur de ses fonctions.
L’échange pouvait durer… durer, même si la file de voiture, fourgons et camions s’allongeait jusqu’à la Mairie (j’exagère à peine), ce qui était important c’est que le dangereux contrevenant comprenne bien qui était le patron en ces lieux, et surtout qu’il ne se fasse pas reprendre sous peine de s’attirer à nouveau les foudres de notre représentant de l’Ordre.
Après avoir stoppé quelques contrevenants, il avait pour habitude de « regarder ailleurs » avant de se déplacer en un endroit moins « sensible », sans doute histoire d’en garder un peu pour le lendemain.
Je le vois encore trônant en haut de escaliers des Halles, endroit lui donnant une visibilité sans faille, mais également où nous le voyions tous, droit, le menton haut, l’air impitoyable, il nous apparaissait tel César ayant troqué sa couronne de lauriers contre un képi.
Je tiens à préciser que durant toutes les années où j’ai connu M. Poublanc, je ne l’ai jamais vu adresser la moindre contravention, tout se réglant verbalement.
Mais sous les airs qu’il se donnait, il s’agissait en réalité d’un brave homme.
Donc oui… l’ancienne devise des Halles de Bayonne aurait pu être : Ordinem et munditiae (Ordre et propreté)
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